Dans « Chettah », le premier long métrage de Lotfi Ait Jaoui en compétition au Festival National du Film de Tanger, le réalisateur propose un film touchant malgré les maladresses, hommage à la danse et à Bouchaib El Bidaoui. Rencontre.
C’est l’histoire de Rabiæ , un jeune sportif. Il est coach et fils d’un Imam très religieux. Il se voit contraint de faire équipe avec une troupe de musique populaire et danser comme Chettah (travestit en habit féminin) afin de gagner une subvention européenne
pour équiper sa modeste salle de sport et épouser sa bienaimée Jamila fille du président de la commune du village… Au casting : Abdelilah Rachid, Ben Issa El Jirari, Ayoub Abounasser, Basma Mazouzi, Abdellatif Chaouqi, Adil Louchgi, Abdelilah Amal, Sonia Okacha, Zhor Slimani et Asmaa Khamlichi.
« Lorsque j étais au lycée je passais souvent par la place Jamaa Al fana et je m arrêtais pour admirer les prestations des différents artistes de la place . À chaque fois, un moment spécial , un véritable festival quotidien qui me faisait rêver . Mais ce qui attirait mon attention et ma curiosité a l époque c’était chettah . Ce danseur déguisée en femme qui parvient à réunir beaucoup de fans .. C’est en 2003 , l’année de mes débuts dans le domaine que je me suis rapproché de ce personnage lors d un reportage avec un prod étrangère » confie le réalisateur Lotfi Ait Jaoui qui s’intéresse au danseur, à cet artiste caché par un déguisement qui danse et s’exprime malgré le jugement de la société. A la fois méprisé et adulé, le danseur est un personnage clé de la société, et de la place Jamaa El Fna.
Qui est le Chettah ?
« Ce sont généralement des hommes qui ont débarqué à Marrakech venant des villages et des villes avoisinantes pour gagner de quoi nourrir leurs familles, ils habitaient à proximité de la place avec leurs épouses et leurs enfants ce qui est étrange. Paradoxalement, ils étaient tous considérés comme homosexuels de part leur choix artistique, ce qui n’était pas toujours le cas » confirme le réalisateur qui décide de faire du sujet une comédie au lieu d’opter pour un drame. Une façon de faire passer des messages lourds plus facilement. Un choix subtile pour cette comédie pour le moins féministe, où les femmes sont plus clairvoyantes que des hommes fermés et têtus. « Ma mère et mes tantes vivaient avec Bouchaib El-Baidawi Celui qui apportait la joie aux familles marocaines loin de l’extrémisme et du fanatisme » renchéri le réalisateur qui a su faire passer des messages importants dans son film.
Un réalisateur « modeste »
C’est tout du moins comment Lotfi Ait Jaoui se décrit. « Je suis un réalisateur modeste ولد الشعب du peuple. J’ai travaillé pendant près de vingt ans dans le domaine de l’audiovisuel, assistant réal pour des projets internationaux. Je veux faire entendre la voix du peuple , Je veux combattre les préjugés! » confie le jeune réalisateur qui auto produit son film. « J’ai rencontré le producteur et nous nous sommes mis d’accord pour faire exister ce travail. Une idée du Feu Hassan Lotfi Fota. .Nous avons travaillé avec le scénariste Youssef Ait Mansour, qui a posé les premières briques, puis nous avons continué avec le second scénariste Mehdi Aboubi de l’Ecole Supérieure de l’Audiovisuel de Marrakech, ESAVv ».
Une oeuvre d’une belle sincérité qui bouscule les tabous et remet la danse à sa place. Dans le coeur des gens qui l’aiment. Le film en compétition porte de belles valeurs et balayent les préjugés et toutes ces idées reçus installées par l’extrémisme. Un film qui fait du bien.