Exclusif. Nada El Hanini, référence montante de la cuisine marocaine sur les réseaux, nous ouvre son carnet de saveurs

Il y a des trajectoires qui s’écrivent à contre-courant, et celle de Nada El Hanini en fait partie. Marocaine installée à Lyon, elle aurait pu suivre le chemin tracé vers une carrière juridique. Mais c’est finalement dans les saveurs de son enfance et la créativité culinaire qu’elle a trouvé sa véritable voie. Sur Instagram, où elle est connue sous le nom de @Nadzsnacks, plus de 250 000 personnes suivent son univers gourmand et lumineux. Ses recettes, aussi originales que généreuses, marient avec finesse la richesse de la cuisine marocaine et les codes contemporains, souvent sans gluten et orientés vers le bien-être. Pourtant, ce qui séduit le plus n’est pas seulement son talent derrière les fourneaux, mais sa personnalité : chaleureuse, authentique, habitée par le désir de partager la culture marocaine autrement, à travers des plats qui réconfortent et inspirent.
Crédit Photo : Manon Gouhier
Nada nous ouvre les portes de son univers, où tradition et modernité se rencontrent dans une cuisine pleine de sens et d’émotion…
  • Nada, avant de parler de votre livre, on aimerait revenir en arrière. Dans vos plats, on retrouve un Maroc vibrant, généreux, coloré… Quels souvenirs d’enfance vous reviennent lorsque vous pensez à votre première rencontre avec la cuisine marocaine ?

Les souvenirs qui me viennent quand je repense à mon enfance sont toujours liés à ma mère, présente chaque jour, matin, midi et soir, pour nous préparer des repas faits maison. Peu importe son emploi du temps chargé, elle prenait toujours le temps de cuisiner.Elle nous a habitués très tôt à des plats faits maison, colorés, généreux et pleins de légumes : des salades marocaines vibrantes, des tagines avec des légumes de saison, du pain maison bien chaud… Je pense que c’est mon premier vrai contact avec la cuisine marocaine, et c’est ce qui a laissé une empreinte durable en moi. Le fait maison, ce n’est pas une corvée, c’est juste quelque chose qui fait partie de qui nous sommes.

Cake aux noix & café épicé marocain
Crédit Photo : Manon Gouhier
  • Vous étiez destinée au droit, et pourtant la cuisine s’est imposée comme une évidence. À quel moment précis avez-vous senti que vos racines et votre passion étaient plus fortes que la voie toute tracée ?

C’est arrivé pendant le confinement, juste après avoir terminé mon stage en droit. C’était le premier moment où je me suis vraiment posée face à moi-même et où je me suis demandé ce que j’avais réellement envie de faire. Le droit n’a jamais été une révélation pour moi, c’était juste un choix par défaut que j’avais suivi pendant l’année, sans jamais y trouver de plaisir.

Mhemssa au lait au safran & amandes caramélisées aux zest d’agrumes
Crédit Photo : Manon Gouhier

À ce moment-là, j’ai commencé à me tourner vers la cuisine, cette activité manuelle qui m’apportait beaucoup de bien. Très vite, elle est devenue l’activité principale de ma vie. Un voyage qui a renforcé ce sentiment : j’ai découvert plusieurs restaurants, et l’un d’eux en particulier m’a beaucoup parlé. Il m’a donné la permission d’explorer et de revisiter la cuisine marocaine à ma façon, en lien avec ma créativité.

C’est à partir de là que ma passion a réellement grandi, et que ma reconnexion avec moi-même a commencé à prendre forme. Je me suis rendu compte que je me voyais pleinement dans ce chemin, pas dans le droit, et je me suis donné les moyens de le poursuivre.

La passion transformée en métier

  • Beaucoup rêvent d’oser une reconversion, mais vous l’avez faite. Comment s’est vécu ce saut dans le vide, entre la rigueur du droit et la créativité des fourneaux ?

J’avoue que ce n’est pas une décision facile. On est souvent paralysé par la peur et confronté à notre réalité. Cette décision m’a demandé de surmonter beaucoup de choses : affronter mes peurs, travailler sur moi-même, et comprendre que la plupart de ces peurs étaient plus mentales que réelles. Ce saut dans le vide, je l’ai fait en me posant beaucoup de questions, en reculant parfois on ne va pas se mentir mais aussi en prévoyant un plan de secours sur le plan financier.

Tarte Filo au Zaalouk
Credit Photo : Manon Gouhier

Pour moi, c’était clair : je ne voulais pas subir ma vie, je voulais m’ouvrir des opportunités et créer. C’était un vrai travail sur moi-même : sauter dans le vide tout en naviguant dans un monde inconnu, avec la peur, mais aussi avec l’envie de construire quelque chose qui me ressemble.

  • La cuisine est pour vous un langage. Si vos recettes étaient un roman, quel serait le premier mot, la première phrase de ce livre imaginaire ?

« Qui aurait cru qu’un simple Tajine Abricot Romarin m’apprendrait le vrai sens de la vie, m’enseignerait la prise de risque, l’expression de soi et la possibilité de transformer ma réalité ? »

  “ Ma cuisine marocaine”

  • Dans votre premier ouvrage, vous revisitez 70 recettes marocaines. Quelle était votre intention en modernisant ce patrimoine culinaire : préserver, réinventer, transmettre… ou peut-être un peu des trois ?

Mon intention était surtout de proposer une cuisine où l’on pouvait s’exprimer tout en restant connecté à mon identité, à mes racines. Oser toucher à une cuisine traditionnelle très respectée, sans pour autant renier les touches de modernité qui existent aujourd’hui dans notre société.

On est le reflet d’une société à la fois très traditionnelle et très ouverte sur le monde, donc très moderne. Cette approche me permet de réinventer les classiques, tout en gardant les saveurs emblématiques de la cuisine marocaine, mais en donnant aussi la permission d’oser explorer de nouvelles saveurs et de s’exprimer à travers la cuisine.

  • Certaines recettes traditionnelles marocaines sont sacrées dans les familles. Comment avez-vous trouvé l’équilibre entre respect de la tradition et liberté créative ?

Je veille toujours à conserver une ligne de saveur qui, même les yeux fermés, rappelle notre palette de goûts. Ce goût là fait revivre toute l’émotion et la proximité qu’on a avec cette cuisine que l’on connaît si bien. C’est ma manière de respecter la tradition tout en laissant libre cours à ma créativité.

 Boules Mehrach olives, fromage & thym
Credit Photo Manon Gouhier

La rentrée, la table comme refuge

  • Septembre est une période de reprise, de courses contre la montre, de repas souvent bâclés. Quels conseils donneriez-vous pour amener, même en semaine, un peu de soleil marocain dans l’assiette ?

Pour mettre un peu de soleil marocain dans l’assiette même en semaine, il faut s’organiser un minimum et revenir à la simplicité. Les tajines marocains sont sains, parfumés, très bons et demandent peu de préparation , juste un peu de temps pour qu’ils soient parfaits au moment de manger.

Briwates aux amandes & orange confite
Credit Photo Manon Gouhier

L’important, c’est aussi de s’éclater sur les saveurs, jouer avec les légumes de saison, et pourquoi pas oser fusionner d’autres goûts dans un tajine, pour divertir le palais, éveiller la langue et s’ouvrir à de nouvelles expériences. Et pour se faire vraiment plaisir, on peut garder les plats plus élaborés pour le week-end, entre amis ou en famille : cuisiner ensemble, profiter du moment et kiffer la cuisine tout simplement.

  • Pourriez-vous partager avec nous deux ou trois recettes de votre livre qui, selon vous, se prêtent parfaitement à cette rentrée effervescente : simples, rapides, mais réconfortantes ?

Tajine Abricots Romain, Poulet aux olives, Pâtes boulettes de Kefta & olive !

 Olives à la chermoula & Feta rôties
Credit Photo Manon Gouhier
  • La cuisine, pour vous, est-elle une façon de ralentir dans un monde qui va toujours trop vite ?

Je sais que ça peut sembler contre-intuitif pour beaucoup, mais pour moi, oui, la cuisine est une façon de ralentir. C’est important pour moi de prendre des journées où je cuisine simplement, sans être pressée, en profitant du processus sans jugement ni attente, et juste en prenant plaisir à l’activité. Comme toutes les activités manuelles, la cuisine peut, si on le souhaite, devenir une vraie manière de ralentir dans ce monde qui va trop vite.

 La transmission

  • Dans vos vidéos comme dans votre livre, vous êtes généreuse, presque intime avec votre public. Que souhaitez-vous que vos lecteurs ressentent en ouvrant Ma cuisine marocaine ?

J’aimerais que mes lecteurs ressentent la chaleur, la proximité et le plaisir que j’ai à cuisiner. Que chaque recette leur donne envie de se reconnecter à leurs sens, de prendre du temps pour eux, et de retrouver cette émotion, cette générosité et cette convivialité qui font partie de la cuisine marocaine. Mon objectif, c’est qu’ils se sentent à la fois inspirés et autorisés à s’exprimer à travers leur cuisine, tout en restant proches de leurs racines.

Credit Photo : Instagram Nadsnacks
  • Si vous deviez transmettre un seul message à un étudiant, un parent ou un jeune actif en cette rentrée : pourquoi cuisiner reste essentiel, même quand le temps manque ?

Je ne dis pas qu’il faut se forcer à cuisiner : ce n’est pas pour tout le monde, et c’est ok de ne pas aimer. Si on peut déléguer, c’est très bien aussi, tant que c’est fait-maison et nourrissant. Mais pour ceux qui en ont envie et qui se mettent la pression, cuisiner devient essentiel : c’est un moment pour se nourrir à la fois physiquement et émotionnellement, pour créer, ralentir et se reconnecter à soi. J’encourage toujours à garder cette habitude, car rien ne vaut le fait maison !

  • Vous disiez espérer écrire “beaucoup d’autres livres ensemble”. Quels rêves vous portent aujourd’hui : un deuxième ouvrage, un restaurant, un retour au Maroc, ou encore autre chose ?

Pourquoi pas ! Ce que j’aime par-dessus tout, c’est vraiment le côté créatif de la cuisine. Me développer dans cet univers, explorer de nouvelles idées et continuer à créer, c’est ça qui m’attire le plus aujourd’hui.

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