Accueil Archives
Archives quotidiennes

novembre 25, 2022

Le cinéaste de l’humain, des grands questionnements de l’humanité, celui qui titille les consciences, l’Iranien Asghar Farhadi offre une conversation débordante d’humanité et d’humilité à la dernière édition du Festival International du Film de Marrakech. Il commence par une intervention sur le processus d’écriture aux Ateliers de l’Atlas avant de proposer une conversation avec des plus enrichissantes. 

 

Avant chaque intervention, le réalisateur Asgar Farhadi commence  en ayant une pensée pour son peuple et les Iraniens qui se battent pour la liberté. « Je suis rempli de tristesse, d’inquiétude mais aussi beaucoup d’espoir. Je suis sûr que cette lutte aboutira et je garde beaucoup d’espoir pour l’avenir ».

 

La genèse d’un cinéaste de l’humain

Il a commencé la réalisation très tôt. Il a commencé la réalisation à l’âge de 13 ans. L’histoire de deux amis qui trouvent un transistor. La joie laisse place au conflit : « Qui doit garder ce transistor ». Ils ont fini par une garde alternée mais le souci c’est qu’il y a une émission tous les soirs et qu’aucun d’entre eux peut suivre puisqu’un jour sur deux, l’un d’entre eux ne peut pas voir. De là est né le fil conducteur de tous les films, le dilemme, l’entre deux, la question de qui on souhaite voir gagner, réussir, y arriver.

 

« Le cinéma que j’aime en tant que spectateur ou réalisateur, c’est le cinéma qui reste dans un rapport démocratique avec son spectateur, un cinéma qui ne lui impose pas sa façon de penser ». Le réalisateur revient sur les prémisses du cinéma où le cinéma était divertissement et le regard du spectateur restait admiratif, d’une nouvelle technique proposée. Cette relation verticale a changé au fil du temps puisque le spectateur s’implique davantage aujourd’hui. Il prend part au jugement. « J’essaye de me retirer de la position de jugement. J’essaie encore de la faire au fur et à mesure de mes films. Je n’ai pas encore totalement réussi ». Le réalisateur revient à cette scène emblématique d’ouverture d’Une Séparation où la caméra scrute un couple à la fin de l’amour. Ce sont les yeux du spectateur qui regardent et donnent leur point de vue sur le début du film.

 

Dès les premiers films, l’ambiance quasi documentaire du film montre une maitrise de la mise en scène du réalisateur iranien. Asgar Farhadi explique que c’est facile d’avoir une atmosphère réaliste et de jouer sur le côté documentaire techniquement. Le plus difficile est d’installer un enjeu dramatique.

 

Le cinéma du questionnement et du danger potentiel

« On pourrait croire que la répétition est source d’ennui mais elle peut être source d’angoisse et de suspense ». Le réalisateur explore les émotions, l’angoisse, les questions existentiels. Il va au plus profond de l’âme et se questionne sur le bien et le mal. La tension est toujours là même dans des moments de légèreté. Il vient de la tension permanant en Iran, inconsciemment peut être mais c’est toujours là. Dans le film « A propos d’Elly » qui lui donne la reconnaissance internationale, la tension est là dès le départ. « On accède à la vérité d’un personnage quand elle est en situation de crise. C’est en situation de crise que l’on rencontre les gens, que l’on sait qui ils sont vraiment ».

 

Il rappelle un proverbe iranien qui dit « Si tu veux connaitre ton ami, voyage avec lui. C’est le symbole de l’inconnu, de la crise perpétuelle ».  Pour le réalisateur, sans crise, il est difficile d’accéder aux sentiments et à la psychologie des personnages. C’est pour cela qu’il n’a de cesse de placer ses personnages dans des situations de crise et de conflits. « L’importance du son est une chose que j’ai compris au fur et à mesure de la fabrication de mes films. Le spectateur fait attention à l’image mais il se lasse à un moment. Le spectateur fait moins attention au son mais inconsciemment c’est une autre histoire ». Dans la fête du feu, les feux d’artifice et pétards créent l’ambiance inquiétante, dans « A propos d’Elly », c’est la mer et le bruit des vagues. « Le son se réfléchit dès l’écriture, on choisit les sons hors champs dès l’écriture, pas à la post production ».

 

Une séparation : succès absolu

 

Le réalisateur ne s’attendait pas à un tel succès. Quand il fait lire le scénario, tout le monde lui dit que c’est un film pour les Iraniens et pour l’Iran, qu’il ne sera compris pour personne d’autre. « Je pense qu’aucun réalisateur ne s’attend au succès et à la réception d’un film » explique Asghar Farhadi. Pour lui, le début et la fin d’un film sont primordiales. C’est un puzzle. Et chaque projet doit avoir un début et une fin. La fin reste sur la décision de cette adolescente qui doit choisir entre le père et la mère : « Je donne la parole à ces jeunes femmes qui doivent avoir le choix de penser et de prendre leurs propres décisions dans la société ». En parlant d’une scène du juge dans le film où la caméra est proche de la chemise du personnage, le réalisateur revient sur l’écriture de la scène. Il pensait à plusieurs plans, une scène très travaillée. Mais sur le tournage, cela a changé. Les acteurs ont donné une autre mouvance à la scène.

 

Après le succès, le réalisateur avoue avoir de la chance d’avoir le choix sur les acteurs. « Avant quand je ne répondais pas à un email, on disait que j’étais occupé. Avec le succès, quand je ne réponds pas, on me dit que j’ai la grosse tête » s’amuse le réalisateur.

 

Asghar Farhadi relève le défi de réaliser un film français : le Passé. Pour lui, la langue n’est pas un obstacle. L’émotion passe malgré cet obstacle-là. « Je viens d’un peuple qui revient constamment sur le passé, c’est dans notre culture ». C’est une confrontation entre le passé et une culture tournée vers l’avenir.

 

Dans « Le client », le réalisateur donne un nouveau tournant à sa carrière et une nouvelle orientation à sa façon de fabriquer des films tout en gardant son emprunte. Il suit un couple d’acteurs qui vivent une situation de la vie. Le réalisateur s’intéressait à brouiller les pistes entre le théâtre et la vie. Ces acteurs restent presque dans leurs rôles quand ils reviennent à leur quotidien. « Cela m’intéressait beaucoup d’explorer ces frontières ».

 

Dans « Todos los saben » où le réalisateur revient à l’étranger, en Espagne pour filmer l’intime avec Penelope Cruz et Javier Bardem. Le film commence à l’image de « A propos d’Elly » avec une fête, de la légèreté, de la musique, de la danse. Mais on sent la tension à chaque fois, comme quelque chose de sous-jacent. Un film où l’on sent la touche du réalisateur malgré l’Espagne. « Je me sentais à la maison en Espagne, c’était pour moi très familier : les gens, les familles, l’atmosphère ».

 

Le réalisateur travaille sur les actes, les répercussions des décisions sur la vie des individus. Quel que soit la nationalité ou la culture. Un proverbe cubain résume bien le film : « Nous ne savons pas de quel passé nous venons ». Une des raisons pour lesquelles le réalisateur est ancré dans son passé et son présent. Il raconte des histoires qui durent dans le temps, comprises de tous. Pourtant il ne pense jamais à l’autre ou à l’universel. Il se raconte et raconte ce qu’il voit. « Ma préférence c’est de toujours faire des films dans mon pays. C’est ce que je souhaite faire. Mais pour des raisons diverses, j’en fais à l’étranger. Ce n’est jamais un choix qui soit de ma propre volonté ». Le réalisateur rappelle que ce n’est qu’en assumant son identité et son histoire locale qu’on accède à l’universel. « L’erreur est de prétendre à l’universalité d’une histoire ».

 

0 commentaires
0 PinterestEmail

La neuvième édition du festival du film arabe de Dublin présente « Becoming », un film dirigé par cinq réalisatrices saoudiennes d’Arabie saoudite.

« Devenir » est une merveilleuse collection de films magnifiquement réalisés qui méritent d’être vus et adoptés et nous savons que le public irlandais sera vraiment époustouflé par le talent et les compétences de ces jeunes réalisatrices », a déclaré l’initiatrice du festival, Zahara Moufid

Il s’agit d’une collection de courts métrages qui illustrent la vie quotidienne de jeunes femmes saoudiennes et abordent des sujets de société aussi « banals » que le mariage arrangé, la conduite automobile des femmes, la religion et l’infertilité mais dont les scénarios et la réalisation confèrent à ces films puissance et émotion.

« Nous sommes ravis du mélange diversifié de films qui feront partie du festival de cette année. Tant de thèmes et d’histoires intéressantes seront racontées. Personnellement, je suis très fière d’avoir la chance de montrer le travail de cinq jeunes réalisatrices saoudiennes à travers le film Becoming. En tant que femme arabe moi-même, c’est tellement bon de voir des cinéastes arabes voir leur travail réalisé et ensuite vu par un public international », a confié Zahara.

Jim Sheridan entouré de Zahara Moufid et de Amira Sheridan lors du neuvième festival du film arabe de Dublin

Ca tourne pour le film arabe à Dublin

Et de neuf pour le brillantissime festival dirigé par le cinéaste multi-nominé aux Oscars, Jim Sheridan, et la réalisatrice marocaine et directrice du DIAFF, Zahara Moufid, à l’emblématique Stella Cinema. Sept films arabes vont êtres projetés pendant le festival avec le lever de rideau, de « Gaza Mon Amour » au Stella Cinema. Les autres films seront diffusés sur le Chester Beatty du Dublin Castle dont trois films palestiniens, un film marocain et deux films égyptiens.

Le concept du DIAFF est une idée originale de la réalisatrice Marocaine Zahara Moufid qui a approché le fameux réalisateur Jim Sheridan pour l’aider à développer et à promouvoir un festival du film arabe et par là même la culture arabe. Avec l’aide de Jim, la vision de Zahara est devenue réalité et le tout premier Festival international du film arabe de Dublin (DIAFF) a ouvert ses portes au Lighthouse Cinema en 2014. Cette année-là, le légendaire acteur égyptien Omar Sharif a ouvert  le festival soutenu depuis sa création par Dubai Duty Free et impliqué des acteurs, des cinéastes et des célébrités de très haut niveau au fil des ans, notamment des cinéastes, des écrivains et des acteurs internationaux. Parmi les visages célèbres qui ont soutenu le festival au fil des ans, citons The Edge (U2), Liam Cunningham de la renommée de « Game of Throne », les actrices Amy Huberman et Fionnuala Flanagan et le musicien et activiste Damien Dempsey.

« Nous espérons que DIAFF, ses films, les histoires et les personnes qu’ils décrivent continueront d’ouvrir les yeux du public sur d’autres cultures, leurs luttes et leur vie quotidienne. Parfois, il est difficile de se rapporter à d’autres cultures, mais le film a un moyen puissant de partager des histoires, d’évoquer des émotions et de permettre au public de mieux comprendre et apprécier les autres cultures et modes de vie », a déclaré le président du festival, le réalisateur Jim Sheridan.

Jim Sheridan et Zahara Moufid entourés de l’Ambassadeur Ahmad Kattouah, de son épouse Sarah Shaibi et de son fils Ali Kattouah

L’Ambassador d’Arabie Saoudite en Irelande Nayel bin Ahmed Al-Jubeir et Ahmad Youness, CEO de l’Arab Irish Chambre de Commerce
L'ambassadeur de Palestine en Ireland et son épouse
0 commentaires
0 PinterestEmail
Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?

Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter Lire Plus

Politique de confidentialité & de cookies
-
00:00
00:00
Update Required Flash plugin
-
00:00
00:00