La Directrice générale Musk Strategies et Experte en médias prend part au mouvement « Les femmes sur leur 31 » et nous livre ses pensées sur la journée de la femme.
- Que représente pour vous l’expression « Se mettre sur son 31 »?
« Se mettre sur son 31 » évoque avant tout le luxe, l’élégance, la fête… c’est l’origine de l’expression. Mais pour moi l’expression évoque d’être moi-même. Là je suis en T-shirt et je me sens sur mon 31. Pour moi, c’est être en harmonie avec ce que je suis, c’est inspirer la femme que je suis. Etre sur son 31 est une expression qui a beaucoup changé pour moi au cours de mon parcours et de mon expérience avec la maladie. Du jour au lendemain, je me suis retrouvée chauve, et même comme ça j’étais sur mon 31. La société nous impose beaucoup de codes à nous les femmes et pour moi être sur son 31 c’est justement casser les codes. Etre belle ce n’est pas porter du 36 et avoir de longs cheveux. Si je suis en harmonie et en paix avec moi-même, et que j’ai confiance en moi, je pourrais inspirer la beauté et la refléter. « Etre sur son 31″ c’est être beau de l’intérieur car si je suis belle de l’intérieur, je le reflète à l’extérieur, et ce chaque jour, pas qu’un 31 décembre, et pas comme l’origine de l’expression le veut. Ce n’est pas porter un beau tissu ou une belle parure ; c’est porter un bon cœur, une grande confiance en soi et assumer le fait d’être femme. Aujourd’hui, on ne devrait plus permettre aux hommes de nous dicter les codes de la beauté. Il y a cette expression arabe que je déteste qui dit « la moitié de la beauté d’une femme est dans ses cheveux ». Pourquoi on ne dit pas que la moitié de la beauté d’un homme est dans sa barbe ou sa taille ? La « demie » beauté n’existe pas. La beauté est complète et une fois on la sent on est belle et on est toujours sur notre 31, qu’on soit un homme ou une femme.
- Le 8 mars alors c’est une journée qui vous agace ?
Personnellement, je ne suis ni pour ni contre le 8 mars, tout dépend de ce que l’on en fait. À la base, ce n’était pas une fête mais une date de revendication, suite à un drame. Finalement, toute action militante vient après un drame. Le 8 Mars, pour moi, c’est tous les jours. Il ne devrait plus être limité aux droits de la femme car selon ma propre opinion, cette date devrait être liée aux droits de l’Homme. Je pense qu’il faudrait qu’on arrête de mettre les hommes et les femmes dans deux cases séparées. Aujourd’hui, il faut qu’on parle de l’être humain dans sa globalité. Il faut qu’on puisse atteindre l’égalité sociale, la justice, la dignité… cette parité concerne aussi bien la femme que l’homme. Pour moi, on conditionne la femme en célébrant et en revendiquant ses droits indépendamment de ceux des hommes, comme si elle venait d’une autre planète alors que c’est un être humain à part entière. Ceci dit, je dis oui au 8 Mars comme date destinée à honorer le mouvement féminin à travers le monde.
Si le 8 Mars me rappelle quelque chose, il me rappelle un journal qu’on a peut-être oublié aujourd’hui. Etant donné qu’on parle aujourd’hui des femmes des médias et aux médias, je me dois d’honorer les premières femmes journalistes au Maroc et rappeler ce journal qu’elles avaient lancé et qu’elles avaient intitulé Le 8 Mars. J’étais petite quand il a été lancé et je suis fière de dire que ma mère faisait partie de ce mouvement et de ces femmes qui avaient lancé Le 8 Mars aux côtés de Latifa Jbabdi, Aicha Loukhmas, Latifa Baka, et plusieurs autres femmes que je ne saurai nommer. Aujourd’hui je leur dis merci, mesdames, parce que grâce à vous, nous sommes les femmes marocaines d’aujourd’hui. Je dis merci au mouvement féminin au Maroc peu importe ses horizons. Je dis également merci à Sa Majesté Mohamed VI, parce qu’il a pu répondre sous son ère, aux revendications du mouvement féminin, notamment au niveau du statut personnel dans la Moudawana où il y avait beaucoup d’inégalités entre l’époux et l’épouse. Certes, on n’a pas encore atteint une égalité totale mais on a traversé un long chemin vers cette égalité. Avant, si une femme se mariait avec un étranger, elle ne pouvait pas donner la nationalité à leur fils, c’était aberrant. Aujourd’hui, Sa Majesté a pu accorder à la femme marocaine la place qu’elle mérite. Il y a eu beaucoup de réformes institutionnelles grâce auxquelles on peut voir des femmes à la tête d’institutions constitutionnelles, mais aussi des femmes Âdoul, et pour moi c’est une preuve d’Islam modéré. L’Islam marocain qu’on a toujours connu, où la femme n’est pas marginalisée. « Les femmes sont les égales des hommes » (citation du Prophète), on n’a jamais dit que l’homme dépasse la femme ; chacun a son rôle. Pour moi, il faut que l’homme garde son rôle, que la femme garde le sien, et qu’on ait accès aux mêmes droits dans l’égalité et dans le respect. L’excellence ne devrait pas être basée sur le genre mais sur la compétence et sur ce que nous sommes en tant qu’êtres humains. Si je suis plus compétente qu’un homme ou qu’une femme, je dois avoir mon mérite par rapport à ce que je vaux dans la société et par rapport à mon éducation.
Aujourd’hui, il faut que le 8 Mars soit une date qui nous permet de revendiquer une chose que je trouve basique, c’est que la femme puisse avoir son droit. Si on s’adresse à une femme rurale par exemple, sa première revendication sera l’accès à l’éducation. Aujourd’hui, les filles comme les garçons devraient tous avoir cet accès, car quand on a une éducation, on peut se forger une personnalité et avoir sa place aussi bien dans la société que dans la famille, nous permettant ainsi de nous défendre. La femme est la meilleure défenseuse de la femme, et l’homme est le meilleur défenseur de l’homme. Toute personne peut se défendre elle-même, il ne faut pas que nous nous attendions à ce que quelqu’un nous accorde ce qui nous revient de droit. Pour moi, c’est ça le 8 Mars.
- Quelle part donne votre programme et votre média à cette journée et à la cause féminine en général?
Je vais commencer par la radio qui est une expérience riche dont je suis très fière. Un homme était le patron de la station, il épaulait les femmes. Nous étions, disons, la seule radio au Maroc où tous les cadres étaient des femmes ; les directrices de station, la directrice commerciale, la DGA était une femme. Nous n’avions pas senti de discrimination, c’est ce qui nous a donné confiance en nous et nous avions transmis cette confiance à nos collègues, aux débutantes, aux journalistes qui venaient d’intégrer la radio, les animatrices. Je pense qu’en tant que responsable à cette radio, j’ai fait preuve d’un esprit de woman empowerment, ce qui devrait être une valeur entre les femmes. Mon expérience ensuite de créer une entreprise spécialisée dans le National Branding et de pouvoir me dire que moi femme je vais pouvoir faire un grand évènement à l’échelle internationale, représenter mon Maroc et faire la promotion de mon pays, que moi femme, si je réussis, je vais inspirer, que moi femme si je peux fédérer et gérer des équipes d’hommes et de femmes, c’est que j’impacte, c’est que j’encourage d’autres femmes qui n’ont peut-être pas confiance, que je suis femme et que je peux faire ça. Aujourd’hui je ne sens pas que l’histoire et autour d’homme ou femme, c’est surtout question de compétence, de confiance en soi, de volonté, sans oublier qu’il existe des femmes fortes dans le milieu rural. J’ai horreur qu’on colle des étiquettes : femme rurale, femme violentée, femme leader ; il n’y a pas de leadership féminin, il y a leadership tout simplement. Il y a village et villageois, pas femme villageoise. Il y a femme marocaine dans toutes ses représentations, qu’elle soit instruite ou pas, qu’elle soit jeune, qu’elle vive dans un village…On devrait toutes avoir une chance. Aujourd’hui, je suis peut-être plus chanceuse, mais si on donne à une villageoise vivant au milieu des montagnes la même chance que j’aie pu avoir, elle sera à ma place. Ce sont les conditions dans lesquelles nous avons vécu et le droit à l’éducation ou pas qui font la différence. C’est pour ça qu’il devrait y avoir une égalité régionale, en termes d’accès à l’école, c’est ce qui devrait être notre revendication au Maroc. Que tous les marocains, hommes comme femmes, aient les mêmes droits et les mêmes devoirs, qu’on ait tous accès aux soins et à l’éducation, et qu’on puisse tous acquérir une confiance en soi. Cette confiance ne dépend pas du genre mais des conditions de vie et l’expérience qu’on a dans la vie.
- Et si vous citiez 31 adjectifs qualificatifs de la femme marocaine…
Pour la femme en elle-même il y a trente milles adjectifs. En premier je dirais c’est la créatrice : c’est elle qui enfante. Généreuse, Forte, Tendre, Sensible, Guerrière, Battante, Belle, Épanouie, Authentique …
« Les femmes sur leur 31 » est une action engagée bien féminine initiée par la rédaction de Hola! Maroc et celle de Visage du Maroc. D’une part le média des célébrités marocaines d’ici et d’ailleurs et d’autre part la plateforme qui met en avant les femmes marocaines entrepreneurs dans divers domaines prédominants de la société marocaine. Chaque deux mois, 31 femmes influentes de diverses univers se prennent au jeu de la photo et de la vidéo, vêtues d’un tee-shirt à l’effigie de la campagne « Les femmes sur leur 31 » et nous livrent leurs pensées sur le 8 mars.